20/12/2012

L'Etat chahuté par ses actionnaires..

En me promenant sur un blog, j'ai lu de la part de commentateurs cette phrase : "L'Etat-Providence que l'on veut à tout prix développer en France".
J'ai toussé. Y en a t-il qui croient encore à ça?

L'Etat Providence c'est un truc d'il y a 30 ans, ça. Depuis l'eau a coulé sous les ponts. On nous a démontré depuis que la solidarité c'était de l'assistanat, une subvention pour promouvoir l'oisiveté, que c'était une prime à la paresse et qu'à cause de ça on mourrait tous de ce fait alcooliques et drogués sur notre canapé. Du coup, on est tous convaincu que la solidarité, c'est mal.
Non l'époque n'est plus à la bienveillance collective. Désormais on se stimule à la providence version loterie et à l'autoflagellation. Ben oui, on a compris, ça fait 20 ans qu'on culpabilise de "coûter trop cher". Faut rembourser.
On coûte trop cher à nos propres entreprises qui ne peuvent pas faire autant de profits qu'elles le voudraient, à nos talents contraints à l'exil tellement ils sont persécutés par la puissance publique, et désormais à nos enfants puisqu'on nous dit que quand on achète une boite de médicament, la moitié sera payée par nos enfants. Il n'est pas un jour où on entende une information, un propos, un détail qui nous rappelle que l'on coûte trop cher. Alors pensez-vous, développer l'Etat Providence pour coûter encore plus cher, nul n'y songe.

Non en réalité, l'Etat Providence fond comme nos glaciers dans les Alpes tout simplement car depuis que les Etats sont obligés de se financer sur les marchés privés, ils ont été petit à petit considérés comme des énormes entreprises lucratives pour les investisseurs. Surtout quand la crise rend les entreprises privées moins lucratives. Et les investisseurs, sous ce titre pompeux, ça reste des capitalistes basiques. Ils ne supportent pas de voir leur part de gateaux s'effriter pour que  les nécessiteux récupèrent des miettes. Ils ont décider de remettre de l'ordre dans tout ça. Et ont décidé de montrer au reste du monde qui c'est qui décide, bon sang.
Les Etats sont pieds et poings liés à leur créanciers, comme le raconte naïvement François Baroin dans son bouquin, quand il relate la scène où il n'en menait pas large face à un patron d'un grand fonds de pension américain pour négocier un taux raisonnable sur les obligations lors de la crise de l'Euro. Mais officiellement notre souveraineté est intacte.
C'est un fait, le Ministre des Finances de la 5ème puissance mondiale, obligé d'embellir la mariée pour ne pas contrarier les investisseurs privés, comme un chef d'entreprise qui doit rassurer ses actionnaires. Une grosse entreprise, remarquez. La France verse 50 milliards d'euros chaque année d'intérêts sur sa dette à ses créanciers. Soit plus que les dividendes annuels distribués par l'ensemble du Cac 40 lors des dernières années. Notre prestige est sauf.
Bref. Peu importe. Nos créanciers, à travers les préconisations des banques de notation, dictent la bonne conduite à tenir pour les gouvernements pour garantir la performance de leurs placements. Qui, dans ces conditions, aurait la naïveté de vouloir sauvegarder l'Etat Providence, je vous le demande?

En attendant dans le petit écran on peut parler des impôts. De l'horrible pression fiscale qui fait fuir nos riches. Souvenons-nous que chaque année la part de la recette de l'impôt sur le revenu est entièrement engloutie par la charge de la dette. Autrement dit, dans les prélèvements obligatoires dont on est champion du monde, une part sert à financer les retraites d'américains qui sont gérées par le fonds de pension dont parlait Baroin.


Dans le petit écran on peut parler aussi de la dette envers nos enfants. C'est vrai, c'est triste de se dire qu'on leur fera payer une partie de la boite de médoc qu'on s'offre aujourd'hui pour guérir le cancer que nos parents à nous nous ont légué en décrétant qu'il fallait adapter la ville à l'automobile. C'est aussi ça la solidarité intergénérationnelle.
Mais qu'ils se rassurent, ce n'est pas la pire dette qu'on leur lègue. C'est marrant d'ailleurs comme on parle moins de nos enfants en revanche quand on évoque les gaz de schiste, le nucléaire, l'exploitation sans vergogne des ressources naturelles et toutes nos autres initiatives compulsionnelles pour maintenir la croissance... De bons rendements financiers pour les investisseurs, certes, mais dont nos enfants auront à payer la facture cachée, demain, lors des futures pénuries, pollution, saturation des déchets et autres dérèglements climatiques aux conséquences géopolitiques inquiétantes...
L'Etat Providence, on a bien compris que c'était un luxe désormais inaccessible. Mais un Etat indépendant, garant de l'intérêt général, sous l'autorité d'un système si possible démocratique, c'est encore trop demander?

On n'en parle pas beaucoup de tout ça. On sait juste qu'on coûte trop cher...

11/11/2012

Creuser, pour reboucher...

recyclage.gif

 

Ils ont réussi.

Ils ont réussi à nous convaincre que nous devions payer. Que nous devons réparer.

Ils ont réussi à nous culpabiliser, et nous tombons dans le panneau.

Nous devons rembourser car nous avons vécu au dessus de nos moyens. 

Trop paresseux, trop malades, trop assistés. Pas assez flexibles, pas assez productifs, pas assez compétitifs.

Le problème numéro un, notre vice, le fléau, le chaos qui nous guette, c'est la dette. 

Notre salut, notre purgatoire, notre rédemption, c'est l'austérité.

 

Peu importe si, drôle de coïncidence, le trou de la dette équivaut peu ou prou à l'argent que nous a prélevé le système financier privatisé en appliquant ses taux d'intérêt, depuis que les Etats n'ont plus eu le droit de recourir à la finance publique, en 1973. Les états se sont vus imposés un intermédiaire privé, entre eux et leur banque centrale, et depuis, on a gentiment rétribué cet intermédiaire,  à hauteur de 1 400 000 milliards d'€ , soit un volume manquant proche de celui du fameux "trou" (1789 milliards en mars 2012). Oui, si nous avions emprunté à taux zéro, à nous mêmes, comme avant 1973, sans verser cette "dîme", cette "gabelle" au secteur privé, nous n'aurions pas une dette ridicule aujourd'hui, on en parlerait même pas.

 

 

 

190910-5.png

 

 

Ils ont réussi à nous convaincre que ce trou, c'est nous qui l'avons creusé, pas eux. C'est fort, non?

Et qui ça "ils"? Je parle tout simplement des acteurs plus ou moins surpuissants du système financier, qui sont passés en quelques décennies du statut de fluidificateurs de l'économie (une banque ne sert-elle pas à la base d'intermédiaire entre emprunteurs et épargnants?) à celui d'inquisiteurs supranationaux qui ont mis les démocraties au pas grâce à la collaboration zélée de nos représentants politiques.

Marginalisés, les quelques milliardaires qui ont amassé des fortunes grâce à une aventure industrielle comme au temps du capitalisme à papa. On en viendrait presque à les regretter. Au moins on avait des usines pour y bosser. 

Désormais, les puissants sans visage se sont construits en collectionnant patiemment les prélèvements permanents, certes souvent indolores, que le monde financier opère sur le monde économique réel. En tirant parfaitement profit et de leur privilège de créancier/propriétaire d'un peu tout, et de leurs talents de spéculateurs sans états d'âmes. Et en désossant, bradant, dévitalisant nos infrastructures pour les transférer ailleurs.

 

Nous voilà soumis, dociles, résignés pour consentir quelques sacrifices, plus ou moins douloureux, afin de résorber la dette. 

La rendre supportable.

La vache à lait du système financier ne doit pas exploser. A nous de faire l'effort.

Voilà l'urgence du monde civilisé.

Qui nous fait marcher au pas. Quitte à décréter la loi martiale. Et nul ne bronche, ou si peu.

 

Bien sûr il y a quelques désordres, mais pas méchants. Voire même opportuns.

Ceux qui veulent pas mettre au pot s'en prennent à leurs voisins, pour peu qu'ils vivent dans des caravanes, c'est plus facile.

Il y a des méchants qui jouent parfaitement leur rôle de méchants, avec leurs grosses barbes et leurs desseins barbares, très pratiques pour entretenir un climat de peur très saturé, et éviter qu'on se disperse avec d'autres inquiétudes. Ils sont parfaits pour canaliser la vindicte populaire, et bien malgré eux ils participent parfaitement au maintien de l'ordre public. Faudra penser à les décorer un jour...

Quant aux "pigeons" autoproclamés, ils sont bien utiles. Ils permettent à nos maîtres de nous rappeler que le droit de s'enrichir est plus important que le devoir de solidarité. Et puis, faut bien se souvenir de qui c'est les victimes, qui c'est les coupables. Les victimes, c'est ceux qui paient trop d'impôts, qui ne peuvent pas s'enrichir paisiblement à cause de nous. Les coupables, c'est nous.

 

Voilà comment la population, qui s'est gentiment faite délester de 1400 milliards d'euros en 40 ans, continue à vivre sous l'emprise de son maître, la finance, et va se montrer plus généreuse encore pour évacuer son sentiment de culpabilité en essayant de reboucher le trou. Étrange, n'est-ce pas?

 

 

 

Notez sinon qu'il y a d'autres dettes.

Et pas des moindres.

 

La dette sociale. 

Le creusement des inégalités, qu'est-ce, si ce n'est une mauvaise redistribution des richesses dont la portée se répercutera sur les générations futures ? A-t-on conscience du coût à supporter pour la collectivité pour faire tourner une société inégalitaire? Pour faire cohabiter des mondes extrêmes de façon stable dans le même espace?

 

La dette écologique.

On va laisser à nos enfants des infrastructures délirantes de routes et autres installations énergivores, et des réserves d'énergies fossiles vides. Des montagnes de déchets. Des centrales nucléaires à démanteler et à enfouir.  Un climat déréglé, des intempéries endurcies, des zones géographiques dévastées.

C'est une facture intergénérationnelle sans précédent.

Un trou insondable.

Rien à voir avec les quelques centaines de milliards d'euros à peine de la dette souveraine de notre beau pays. Non c'est incomparable. Ce n'est pas estimable. Pour cela plus encore que pour tout le reste, les euros ne sont qu'une monnaie de singe..

 

Dette sociale. Dette écologique. Ces dettes là n'existent pas dans le prisme de notre système médiatico politique. Ils n'ont d'yeux que pour cette "dette" soi disant souveraine, qui déstabilise à peine notre système bancaire déjà bancal pourtant.

 

Ces belles autruches nous mettent la tête dans le trou, mais le mauvais trou, celui qui n'est qu'anecdotique, pour être sûr que rien ne changera avant qu'ils ne disparaissent.

Oui, c'est amusant, l'austérité, ça consiste en fait à creuser un nouveau trou pour en reboucher un précédent, et éviter qu'on fasse des choses plus utiles.

 

Shadok2.jpg

 

 

 

 

31/10/2012

Des camemberts pour clouer le bec des corbeaux de l'austérité, et autres renards des rentes en mal de compétitivité

Vous en avez marre de les entendre se plaindre et de tenir des discours moralisateurs à l'encontre de la population sans pouvoir réagir? Vous souffrez de ne pouvoir leur rétorquer quoi que ce soit quand ils vous assènent leurs grandes vérités à coup d'arguments macroéconomiques, saupoudrés de % et de milliards et autres ingrédients abstraits et indigestes?
Remettez leur sous le nez ces simples graphiques officiels et demandez leur de se positionner. Avec un peu de chance, ça leur mettra en évidence les biais que leur idéologie d'actionnaires fait prendre à leur raisonnement, quand ils prétendent donner des leçons de bonne gestion à l'Etat tout en occultant 15% de ses dépenses.
15%. C'est gros comme le bec au milieu de la figure d'un toucan, et ça devrait le leur clouer !



1 la répartition de la dépense de l'Etat par catégorie de dépense

Juste pour bien leur rappeler que l'Etat dépense plus pour payer les intérêts de la dette (14,8%) à ses créanciers que pour son fameux "train de vie" tant décrié... Il ne s'agit pas du remboursement du capital, hein, juste des intérêts. On entretient cette dette. Le coût d'entretien de la dette publique est supérieur au coût d'entretien matériel, concret, réel de l'Etat.
depenses_nature_2011_01.jpg


2 la répartition de la dépense de l'Etat par affectation cible
Ici on voit que l'Etat consacre six fois plus d'argent au paiement des intérêts de la dette à ses créanciers (60 milliards d'euros) qu'à la lutte contre le chômage par an (10 milliards d'euros).
64ad117e08.jpg
 3 les ressources de l'Etat
Et donc bien se souvenir, quand on crie à l'injustice sur la soit-disante oppression qu'on subit en France à cause des "charges", qu'on pourrait s’exonérer de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les société si on avait continué à emprunter à taux zéro à nos banques centrales, plutôt qu'à des taux d'intérêts substantiels auprès des marchés privés... Mais il semble que de ce côté là ça ne les contrarie pas que l'Etat se comporte en vache à lait des capitalistes...
recettes_Etat_nettes_md_2011.jpg

30/10/2012

"Nous, dirigeants ADULTES ET RESPONSABLES des plus grandes entreprises…"


"Nous, dirigeants des plus grandes entreprises privées françaises 
- qui avons allègrement profité de ces dernières décennies de privatisations et déréglementations, pour se partager des parts de marché substantielles et élargir notre business,
- qui avons bénéficié de décennies de lutte frénétique des pouvoirs publics contre le chômage (budget de 10 à 20 milliards par an pour obtenir toutes sortes d'aides diverses et variées destinées à créer ou maintenir des emplois), tout en continuant des politiques de rationalisations, et autres délocalisations  productrices de chômage de masse,
- qui avons bénéficié de décennies d'aides publiques pour nous assister dans l'innovation et la "compétitivité",
- qui n'avons jamais renoncé à rétribuer abondamment nos actionnaires (ces dernières années, les seules entreprises du CAC 40 ont systématiquement reversé au total chaque année entre 30 et 40 milliards d'euros de dividendes ),
- qui ne nous sommes jamais trop émus du fait que depuis plusieurs années tout cela ait fortement aggravé la "dette publique", dont le coût constitue une belle manne pour le système financier. 

proposons au gouvernement un pacte pour relancer la croissance et l'emploi. 

Il traduit notre ambition pour la France et est conçu dans un esprit de dialogue.
La France affiche un déficit sans précédent de son commerce extérieur, de ses paiements courants, de ses finances publiques et de ses comptes sociaux. 
Les marges de nos entreprises sont historiquement basses. 
Le chômage sape la cohésion sociale et exclut notre jeunesse. 
La France doit se transformer en profondeur. Il est urgent d'agir maintenant et collectivement. 
Nous préconisons une réponse globale adossée à des mesures simples et concrètes.
En effet, 
- conscients que nous n'avons jamais réellement participé à la lutte contre le chômage et les inégalités, 
- conscients qu'en dépit de leur puissance financière, nos entreprises ne se sont pas impliquées dans les enjeux d'intérêt général autrement que sous la contrainte ou par opportunisme commercial,
- conscients que la majeure partie de la population ne peut être tenue responsable des mauvais choix stratégiques, managériaux et commerciaux de l'industrie française,
nous avons décidé de nous montrer enfin responsables et d'assumer nos actes et nos comportements dans cette période de crise. 
Nous nous engageons donc à ne plus nous défausser aux dépens des plus faibles, de ne plus dénoncer l'assistanat dont bénéficierait les petites gens sans évoquer celui dont nous bénéficions, de ne plus décrier le manque de productivité de la fonction publique alors que le secteur privé n'est pas en mesure de maintenir une performance durable sans recours permanent à la puissance publique.
Nous renonçons à imputer nos "défauts de compétitivité" aux prétendues lacunes comportementales de la population active, soit-disant trop malade, trop paresseuse, trop resquilleuse, trop incompétente.
Nous reconnaissons la dimension monétaire du problème. Nous reconnaissons que notre monnaie est surévaluée pour nous permettre de mieux profiter des richesses du reste du monde, notamment du pétrole, et qu'on a délibérément laissé notre balance commerciale se déséquilibrer.
Nous reconnaissons que l’efficacité des organisations de nos entreprises, la stratégie commerciale, le management, la capacité à motiver les troupes sont entièrement de notre ressort, et que nous sommes entièrement responsables de la performance économique de nos entreprises.
Nous devons assumer cette situation et y faire face.
Nous admettons que baisser les charges et augmenter le temps de travail ne pourra jamais permettre de rendre un travailleur français aussi compétitif qu'un travailleur payé 20 fois moins cher à l'autre bout de la planète.
Ayant intégré que le "tout concurrence" a atteint son niveau de saturation, nous sommes conscients que la performance économique globale du monde ne peut que décliner.
Nous avons pris conscience que la compétition généralisée génère un gâchis humain et environnemental dont le coût ne peut plus être négligé, et qui risque de croître exponentiellement si on persiste dans cette voie.
Nous avons fait le deuil de l'idée que la croissance pouvait éternellement payer les rentes des détenteurs de capitaux. Nous allons nous mettre au travail pour sevrer ces capitalistes de leurs rentes, car ils ne pourront plus la prélever dans un monde désormais physiquement privé de croissance.
Conscients de l'imposture que le monde capitaliste a exercé sur le monde réel durant ces dernières décennies, en dépossédant la puissance publique de sa capacité d'investissement et en construisant une puissance financière privée plus forte désormais que les Etats, nous pensons que cette phase de prédation a atteint ses limites et que le monde réel ne supportera pas plus longtemps la vampirisation illégitime qu'opère sur lui la sphère financière.
Conscients que la faible valeur ajoutée apportée par l'activité financière à l'économie réelle est sans commune mesure avec la ponction de richesse qu'elle opère sur le monde, nous demandons le retour de la mission de financement public dans le giron des états. 
Tout comme le secteur de la santé, l'éducation, ou la justice, le secteur de la finance est un secteur trop stratégique vis à vis de l'intérêt général pour être confié au secteur privé.
En réponse à la crise, nous demandons à ce que les dividendes des entreprises soient désormais versés à un fonds de réparation des dégâts sociaux et environnementaux du capitalisme financier, pour éviter de solliciter les populations déjà fragilisées. 
Nous nous engageons, dans le cadre de nos fonctions de dirigeants puissants et influents, à oeuvrer pour favoriser l'émergence d'écosystèmes économiques respectueux de l'environnement et des populations, pour tirer le reste du monde vers le haut, au lieu d'incriminer la compétition mondiale pour nous tirer vers le bas.
Enfin, purs produits de l'imagination d'un blogueur fantaisiste, nous, dirigeants ADULTES ET RESPONSABLES des plus grandes entreprises, ne demandons qu'à exister dans le monde réel.




13/05/2012

Ci-git la droite française républicaine (1945 - 2007)


C'est reparti comme en 14...
Les complexes sont passés de droite à gauche. La culpabilité aussi. On le constate depuis les reniements mitterrandiens, la chute du mur de Berlin, Maastricht, Villevoerde, le TCE, etc... Moins la gauche est de gauche, plus elle s'excuse de l'être. Drôle de paradoxe que les sociologues nous expliqueront sans doute un jour, s'ils se mettent à décortiquer les sphères du pouvoir dans un système de démocratie représentative en régime capitaliste...
La campagne électorale de François Hollande nous l'a encore une fois montré. La tendance est profonde.

Plus surprenant, quoique logique finalement, c'est ce qui se passe en face. C'est l'enseignement majeur de l'élection présidentielle française : la stratégie presque gagnante de la ligne "Buisson" a finir de mettre à terre ce qu'il restait du front républicain.
On est en train de réaliser avec le recul que la parenthèse gaulliste de la droite française a bel et bien pris fin en 2007, lorsque que le candidat d'alors a déclaré qu'il fallait engager la "rupture". Et nous a montré que la République, c'est comme l'environnement, ça commence à bien faire...
Un demi-siècle, c'est le temps qu'il a fallu à la droite pour faire contrition. Une génération est passée. La droite sarkozyenne ne veut pas plus porter la culpabilité de Vichy que celle de la colonisation. L'après-guerre est terminée. Fini les pansements. La sécurité sociale, les retraites avec trop de répartition, l'Etat trop laïc, trop providentiel.. Faut réformer, revenir aux fondamentaux de droite.
Le paternalisme bienveillant du général a fait long feu. Le vaccin de la seconde guerre mondiale n'a la durée de vie que de celle de notre mémoire collective, c'est à dire quelques décennies au plus. A l'heure du bombardement cathodique permanent et de l'enfermement dans l'immédiateté, l'amnésie prend l'ascendant sur le souvenir. La France généreuse et ouverte, c'était hier. La France doit être forte (vis à vis des faibles). Il est temps de repartir... comme en 14.

Le vice caché de la construction européenne
La droite française républicaine pourra-t-elle renaitre de ses cendres, après 35 ans de déclin et 5 ans de léthargie? Seul Bayrou semble avoir le courage de s'opposer à cette fatalité. Mais son crédo, l'intégrité morale et l'honnêteté gestionnaire, ne semble pas parler à l'électorat de droite, éduquée en Chiraquie et donc heureuse en Sarkozie.
La droite semble inéluctablement disposée à laisser glisser le pays vers la technocratie capitaliste européenne en rénovant le cadre poussiéreux de la nation pour donner aux masses un os à ronger d'inspiration fasciste. Faire croire à un regain de souveraineté nationale pour masquer la perte de souveraineté démocratique. Et confirme le spectre terrifiant qui semblait trop gros pour être vrai. Mais c'est un fait, l'histoire se répète : l’Europe revitalise le nationalisme et le fascisme, alors qu'elle a été (officiellement) construite pour les combattre.

L'entourloupe libérale
"L’antifascisme tue la démocratie". Voilà un trompe-l'oeil évoqué  ici, fruit de l'amalgame entre antifascistes et socio-libéraux. Ce n'est pas parce que les socio-libéraux se voulaient antifascistes qu'on peut les confondre. En réalité c'est une supercherie dont la gauche naïve a été la victime (consentante?). L'Europe libérale nous a été vendue pour démanteler l’Etat Nation, et ce afin d'affaiblir la Nation. A l'arrivée elle a affaibli l’Etat mais pas la Nation..
Des décennies de confiance aveugle, à accepter à contrecoeur l’idée que le commerce était le langage commun de tous les européens, et que la politique n’avait pas besoin d’être discutée par les peuples entre eux. Pas besoin de leur apprendre à parler la même langue, ils parlent tous l’Euro : la main invisible du commerce gère tout pour eux, les autres discussions ne relevant pas de la sphère économique continuent à se traiter de façon traditionnelle au niveau local (national donc).
La prise de conscience est brutale. Loin des grandes utopies théoriques, la main invisible est juste pilotée par la technocratie et les lobbies financiers. Le constat est sans appel. Le néolibéralisme si séduisant n'est que l'habit moderne du capitalisme ancestral.
Nous voilà aujourd'hui avec ce recul démocratique entériné, et les décennies de gouvernances nationales menées sous le sceau de l'obscurantisme politique (ignorance de la réalité macro-économique du monde, stigmatisation microscopique du pauvre, immigré, assisté, bref du plus faible..) sont le meilleur terreau pour la ré-émergence du fascisme...
Va-t-on assister à la répétition de l'histoire, sous l'oeil complaisant des classes dominantes?

Chacun contre tous, tous contre chacun
Certes la barbarie du siècle dernier n'a que peu de chance de se reproduire dans sa forme nazie. Mais en clamant en permanence qu'on vit dans le meilleur système de civilisation et qu'il n'y a pas de place pour ceux qui ne savent pas s'y adapter, ne prend-on pas le risque de voir se concrétiser une certaine forme de purge contre les inadaptés, les faibles, les nuisibles désignés?
La crise fait vaciller le monde entier. A tous niveaux, l'addiction à la propriété privée a maintes fois prouvé que l'humain est capable de fermer les yeux sur la laideur du monde, voir d'y prendre part activement, si son patrimoine, quelle qu'en soit la taille, est en jeu.

Ne nous y trompons pas. Il ne semble pas idiot de penser que le néolibéralisme fait volontairement pencher l'édifice du côté du fascisme pour être sûr qu'en cas d'effondrement, la casse soit limitée et que l'ensemble ne tombe pas du côté du collectivisme. Le fascisme restera toujours la soupape de sécurité du capitalisme. Celle qui aide à prendre de la matière humaine comme variable d'ajustement afin de prolonger son existence.
La droite gagnerait à ne pas se ranger dans le sillage de cette dérive, et serait bien inspirée de renoncer à la société patriarcale du "chacun contre tous et tous contre chacun" Sarkozyen, sous peine d'être à nouveau ternie par le nom d'une ville évoquant une autre époque, et dont aucune couleur ne saura jamais embellir le tissu quadrillé.

07/05/2012

On a failli récidiver...

Ouais, il était grand temps que ça se termine...

Ça devenait de plus en plus malsain, ça a failli basculer dans la récidive !

On peut remercier l'approximation des sondages... Si ceux ci avaient mieux évalué la montée de Marine Le Pen au premier tour, si ceux ci n'avaient pas surestimé le vote de gauche, Sarkozy aurait sas doute dégainé plus vite ses clips de campagne anxiogènes et aurait peut être réussi son coup...

Bien sûr, c'était François

Bien sûr, y a eu Toulouse.

Mais comment peut-on expliquer un si spectaculaire rebond des intentions de vote pour Sarkozy dans l'entre deux tours, alors que :
- Hollande l'a coiffé au premier tour (de peu, certes)
- Hollande a réussi un bon débat
- Sarkozy s'est agité dans tous les sens, s'est empêtré dans son concept de "vrai travail", s'est fait reprendre par son premier ministre sur la stigmatisation des syndicats..
- Bayrou, un des politiques les plus populaires du pays, a donné sa préférence à François Hollande.

N'importe quel candidat normal se serait effondré. Mais Sarkozy, lui, a progressé.

La seule explication que je vois, c'est un phénomène qui fait penser à la réelection sur le fil de Bush Jr au dépens de Kerry, alors que les sondages prédisaient l'inverse.
Faire peur, tout simplement.
J'espère que les spécialistes pourront décortiquer ça, mais j'ai l'intuition que les spots de campagnes anxiogènes de l'UMP, pleins d'images subliminales comme inspirées des messages négatifs des clips américains, ont failli réussir leur coup :
- avec leurs images d'émeutes grecques et espagnoles, de chaos et de drapeaux rouges, symboles de la banqueroute socialiste (clin d'oeil appuyé aux électeurs de Bayrou)
- avec leurs images de panneaux en arabe pour évoquer l'immigration digne des plus grands clips de Mégret (clin d'oeil de l'autre côté)

Comment expliquer que Sarkozy ait obtenu de tels reports de voix des électeurs de Bayrou et de Le Pen, alors que ces derniers ne le soutenaient pas, bien au contraire? Son poujadisme anti-corps intermédiaires (syndicats, profs, magistrats, journalistes) aurait-t-il payé soudainement en fin de campagne? Je n'y crois pas trop. Comment un Sarkozy impopulaire, fatigué, décrédibilisé, fragilisé par les sondages a t-il pu à se point remobiliser les électeurs si ce n'est par l'action inédite du matraquage anxiogène de ces images cathodiques?

Quelqu'un a-t-il une autre explication?

01/05/2012

La française des jeux, nouvelle version de l'Etat-providence...

Vrai ou faux travail, c'est la question en vogue le 1er mai, mais en réalité tout le monde s'en fout.

Pour la bonne et simple raison que tout le monde a intégré que le travail ne paie plus depuis longtemps. C'est le capital qui a gagné. C'est lui qu'il faut viser. De la vieille et bonne propriété privée, et qui rapporte si possible.

Enrichis toi, et le banquier t'aidera...

Le travail c'est juste un statut, un brevet de bonne conduite, une attestation à présenter pour montrer que tu n'es pas un chômeur, un assisté, un fonctionnaire, un syndicaliste. C'est à dire que ta rémunération mensuelle n'est pas prélevée sur le dos des autres. Bref, que tu n'es pas un parasite.
Euh, les rentiers ? Non, ça se sont des investisseurs, ils ne vivent pas à notre crochet, c'est nous qui mangeons grâce à eux. Voyez la nuance !

Oui le travail ne paie plus, disais-je.
"L'ascenseur social est en panne", voilà un poncif régulièrement resservi depuis des années. Or comme il ne croit plus en l'efficacité des pouvoirs publics depuis belle lurette, le français moyen semble en avoir fait le deuil et vise d'autres stratégies pour tirer son épingle du jeu.

Cela fait d'ailleurs belle lurette que les pouvoirs publics eux mêmes nous ont aidé à faire ce deuil. Tu ne peux compter que sur toi même. Tu n'obtiendras rien des autres. N'attends plus d'arrangements collectifs. Les ententes sont une corruption qui nuit à la bonne marche de la concurrence totale. La solidarité est un vice, la concurrence c'est la vertu. Et le social, c'est le mal ! 

Souvenez-vous de la panacée des retraites par capitalisation individuelle qui devaient sauver le monde, si un grain de sable en 1995 imputable à notre archaïsme syndicaliste n'avait pas tout fait capoter. Ce n'était que partie remise. Certes les retraites sont encore pour longtemps encore empétrées dans cet affreux collectivisme, mais pour le reste, on est sur la bonne voie.

On a bien compris que dans ce monde, on est seul contre tous. Pour consolider son niveau de vie, et le transmettre à sa descendance, il faut donc se constituer un patrimoine par ses propres moyens. 

Tous propriétaires (donc tous généreux bienfaiteurs des banques)

Les français le savent bien, qui achètent un logement non plus pour se loger dans les meilleures conditions possibles, mais de plus en plus pour spéculer

De nos jours, c'est comme ça qu'on s'enrichit. En étant plus malin que les autres. On est assez malin pour jouer le pigeon pendant 30 ans à s'endetter auprès d'une banque, car on sait qu'à la fin on trouvera bien un pigeon bien moins malin que nous qui nous rachètera la baraque à un prix d'or et qu'on fera donc la culbutte. On est malin n'est-ce pas? (bon bien sûr, faut pas que la crise mette le bazar, mais bon, on est bien protégé, hein?)

L'essentiel, c'est de devenir riche. Ce n'est pas notre président qui nous contredira, pour qui la vie ne vaut pas d'être vécue si on n'a pas cette perspective (j'exagère, il a juste dit que Steve Jobs avait dû payer 75% d'impôts sur son revenu, il aurait gardé son génie pour lui tout seul, et l'humanité tout entière aurait dû continuer à vivre sans iphone, ouille !). Il nous a d'ailleurs répété il y a peu qu'il était immoral que l'Etat "se serve au passage" quand il s'agissait de transmettre un patrimoine à ses enfants. Ben oui, à quoi bon s'épuiser à s'enrichir si on ne peut pas fonder de dynastie familiale? 

Une chance au tirage, une autre au grattage

En dernier recours, quand on ne nait pas avec une cuillère en argent dans la bouche ou un cerveau de Steve Jobs dans le crâne, et qu'on n'a pas la patience d'attendre 30 ans, il te reste l'Etat-Providence, dans sa nouvelle mouture, intégralement compatible avec le capitalisme, celle là. En d'autres termes, si tu n'as obtenu la réussite par héritage, et que tu n'as pas pour autant démérité,  remets-en toi au hasard.

Le jeu en vaut tellement la chandelle, qu'on serait idiot de pas tenter. La française des jeux est ta dernière planche de salut !

Faut dire qu'on a sans doute la meilleure française des jeux du monde, nons voisins nous l'envient. Un pôle d'excellence à la française ! Reconnaissons le, la stratégie du gouvernement durant ce quinquennat a porté ses fruits : pour faire face aux conséquences des délocalisations et de la crise, il avait tout misé sur la libéralisation du commerce des jeux en ligne. Activités qui allaient stimuler la croissance, regonfler les recettes fiscales, bref, rebooster l'économie ! Sous l'oeil gentiment critique du PS, qui m'avait fait rire à cette occasion en parlant sans sourciller d'aider la Française des Jeux et le PMU à renforcer leurs missions d'intérêt général !

Révélation (au village)

C'est vrai qu'au début, je me demandais si les français ne nous faisaient pas un syndrome de Stockolm avec le capitalisme. En effet, plus le capitalisme les enfonce, plus ils s'accrochent au capitalisme.

Puis je me suis écrié "Eureka, j'ai trouvé". J'ai compris l'idéologie capitaliste et ça m'a convaincu. On est bien seul contre tous. Méfions-nous de tout le monde, le monde est sauvage, dangereux, il y a trop d'étrangers mais pensons d'abord à nous. Accordons nous la préférence, accordons nous la priorité... Et ne nous faisons pas de cadeaux... Il est tellement plaisant de niquer les autres et de ne pas payer d'impôts. L'impôt, c'est le mal absolu. Tout le monde a le droit de devenir riche, tant que ça ne me coûte pas un sous d'impôt. Voilà notre nouvelle devise...

Je préfère donc donner à la Française des Jeux, plutôt qu'au Fisc, car j'ai plus de chance de finir riche de cette façon,  même si in fine ça va à l'Etat... Ca me contrarie moins...
D'ailleurs, dans mon village, il n'y a plus de poste, plus de perception, mais un Tabac Presse PMU. J'y vais tous les jours tenter ma chance. C'est ça l'égalité des chances désormais... J'y crois chaque jour. C'est ainsi que j'ai retrouvé foi en l'avenir...



24/04/2012

La fracture intellectuelle. Clé de voûte du système

On peut certes attribuer la responsabilité du score de Le Pen à Sarkozy qui a passé 5 ans à jouer avec le feu au niveau idéologique, tout en cultivant le terreau social du FN (chomage, corruption, frustrations économiques). Mais cela ne dédouane pas non plus la gauche.  

Chirac évoquait la fracture sociale mais a pris bien soin de ne pas la ressouder. Sarkozy l'a rebaptisée "rupture" pour mieux l'aggraver. Et le PS, lui, l'a occultée.

Quand Attac voulait faire de l'éducation populaire à la fin des années 90, pour montrer en quoi la mondialisation et l'orientation libérale de l'Europe, entièrement asservie à "l'organisation commerciale du monde" (plus précisément l'OMC), et la financiarisation de l'économie (la fameuse dictature des marchés), le PS ne l'a pas suivi. Quand Attac dénonçait la mise en concurrence des peuples les uns contre les autres, le dumping social et les délocalisations, le PS n'a pas suivi.

Attac a fait long feu. Pas facile d'expliquer le concept abstrait de "dictatures des marchés" aux petites gens qui galèrent et attribuent leur déboires à la fraude du voisin, pour peu qu'il ne soit pas français de la même souche, qu'il ne soit pas originaire de la même religion...

Pendant ce temps, l'éducation pupulaire de droite fonctionnait bien.
Dénigrement permanent de l'Etat, de la fonction publique, stigmatisation des "nuisibles", le processus d'atomisation sociale façon TF1 a bien fonctionné. Toute considération collective autre que l'approche nationaliste est disqualifiée. La "dissociété" de Jacques Généreux est bien là. 

Le PS, lui, restait atone.

Les 18% de Marine Le Pen viennent nous le rappeler. La fracture intellectuelle est là. Soigneusement entretenue. 

La droite a réussi à retourner l'arme FN contre la gauche. La droite a réussi (involontairement?) à dévitaliser l'electorat de gauche, en "parquant" durablement à l'extreme-droite une grande partie des votes des plus modestes (1), et à les maintenir dans l'obscurantisme du FN.

Entre-deux-tours.

Je scrute et reste attentif. Comment le PS va-t-il réagir à cette nouvelle offensive poujadiste de Sarkozy (2)? Bien sûr, l'homme est sans doute décrédibilisé (on s'étranglera juste une fois de plus de la mauvaise foi légendaire de la part de celui qui se gave de l'argent du contribuable plus ou moins légalement et parle de "l'Etat qui se sert" en évoquant des actes de vol (les fraudeurs), tout en augmentant la TVA, pour financer ses campagnes électorales, entre autres.. ). Mais le discours passera sur le fond auprès d'une grande partie de la population.
Si le PS n'est pas capable de défendre l'impôt sur les successions, de rappeler aux petites gens la nécessité de redistribuer les cartes pour garantir l'égalité des chances et lutter contre les inégalités, alors cette fracture intellectuelle se sera élargie encore un peu plus. Et la droite sera majoritaire pour plusieurs décennies encore...


Notes : 

(1) Etude sur l'électorat de Marine le Pen

 L’éducation reste un marqueur très important

L’électorat de Marine Le Pen est ensuite marqué par une «certaine souffrance sociale». Il y a une surreprésentation de cet électorat, avec 26% de ces personnes qui affirment s’en sortir très difficilement avec les revenus de leur foyer, 20% chez ceux qui s’en sortent plutôt difficilement, contre seulement 14% chez ceux qui s’en sortent plutôt facilement avec leurs revenus.

L’éducation reste un marqueur fort de ce vote. Dans cet instrument, si 22% des personnes ne sont pas titulaires du baccalauréat, la proportion s’élève à 41% chez ceux qui apprécient le plus Marine Le Pen. Et plus on accumule les diplômes, moins on a tendance à voter FN. «Ce que l’on voit, indique Anne Jadot, c’est une confirmation que la barrière de l’éducation n’est pas levée chez les électeurs FN.»

(2) Sarkozy le 23/04/2012 discours sur le vrai travail

«Le vrai travail, c’est celui qui se dit "oh, je n’ai pas un gros patrimoine, mais le patrimoine que j’ai, j’y tiens (...) ce patrimoine-là, on ne me le volera pas"», a-t-il insisté. «C’est celui qui dit "toute ma vie, j’ai travaillé, j’ai payé mes cotisations, j’ai payé mes impôts, je n’ai pas fraudé, et au moment de mourir je veux laisser tout ce que j’ai construit à mes enfants sans que l’Etat vienne se servir"»



15/04/2012

Rupture et dérupture. Sarkozysme et anti-sarkozysme sont sur un bateau...

Pantani politique

Si, si, le Sarkozysme, ça a existé.

Oui c'était du vent, mais le vent, ça fait des dégâts bien réels.

Le Sarkozysme,  ça pourrait être à la Vème République ce que Armstrong a été au Tour de France. Redoutable, invincible, dominateur, mais dénigré, car objet de toutes les suspicions.

Et peut être ça ne sera même que Pantani. Auteur de l'ascension la plus éblouissante de l'histoire, la plus grosse performance de grimpeur, mais factice. L'exploit qui fait pschiittt. Et l'amertume, la honte, pour ceux qui y ont cru jusqu'au bout, qui se sont extasié à tort.

Certes Sarkozy reste présumé innocent de toutes les affaires qui le cernent. Mais peu importe qu'il demeure à jamais le virtuose du "Pas vu, pas pris", peu importe que Van Ruymbecke finisse sa carrière bredouille, le verdict de l'histoire sera lui, implacable.

Celui d'une énorme illusion. Remarquable par sa durée. 5 ans, ce n'est pas rien. Plus si l'on compte le festival médiatique depuis que Sarkozy a accédé au ministère de l'intérieur.

Des années où les masses n'y ont vu que du feu.

L'opinion, cette "chose" vulnérable qui fait la pluie et le beau temps (à la guise des gouvernants)

Cinq années surtout accablantes pour l'opinion, en fait.

Oui je sais, l'opinion ça n'existe pas. C'est une vue de l'esprit. Mais tant pis, laissons nous aller à cette approximation journalistique si fréquente qui consiste à dire que l'opinion pense, veut et ne veut pas, ou même décide...

L'opinion donc s'est faite mener par le bout du nez par un orateur hors-pair, un vendeur d'aspirateurs hors du commun. Un brasseur d'air fournisseur d'émotions, un dramaturge du fait divers, tous les soirs à 20h à domicile, sur votre canapé, dans votre bocal. C'est gratuit.

L'opinion, sous influence, y a cru à cette idée séduisante, qu'il suffisait d'agir, au lieu de réfléchir. Elle y a cru à l'idée qu'il fallait faire une rupture avec l'héritage républicain. Qu'il ne fallait plus s'embarrasser de principes moraux, éthiques, politiquement corrects. Elle lui a fait confiance à l'homme providentiel qui va tout résoudre en ne changeant rien. Qui va choper les coupables de tous les maux et réhabiliter la France qui se lève tôt. Elle a cru qu'il suffisait de travailler plus pour que tout rentre dans l'ordre. 

"Foutez-vous un bon coup de pied au cul et tout ira mieux", nous disait-il. Voilà, on se l'est mis ce coup de pied au cul, pendant que lui s'amusait bien de son côté. Et on n'est pas plus avancé.

Quinquennat de rattrapage ou de cicatrisation?

Pour moi, militant lambda de la génération "Attac" laminée par le 21 avril 2002, le purgatoire est décidément très long. On a pris 10 ans dans la vue et on doit assister impuissants à ce qu'on signalait à la fin des années 90: dictature absurde et morbides des marchés financiers, mondialisation prédatrice et aveuglante, planète en perdition. 

Aujourd'hui je devrais m'engager à fond entre Eva Joly et Mélenchon. Pourtant je continue à rester mesuré, patient. Résigné derrière Hollande. Pourquoi donc?

L'opinion a cédé à la facilité en 1997, elle reste convalescente. Pas encore assez libérée de l'emprise de Sarkozy à mon goût. Elle hésite même encore à lui consentir un charitable quinquennat de rattrapage lorsqu'il revient jouer la repentance sincère à la télévision. Mendier une seconde chance, un sursis, un rattrapage.... Un comble pour celui qui a pavané pendant des années en promulguant la culture du résultat, et en se montrant impitoyable envers ceux qui échouent. Il y a de quoi tousser. Mais l'opinion s'en offusque à peine.

Opinon déboussolée

Ou bien, si comme le préssent Mélenchon, le vent se met soudainement à tourner en faveur de la gauche, et que celle ci sort majoritaire du scrutin alors que cela fait 10 ans qu'elle est minoritaire y compris dans les débats de société, j'aurais eu tort et ce sera tant mieux. Mais ce changement de vent soudain ne constituera qu'un symptome d'une versatilité de l'opinion plus forte que je pouvais le penser. Si l'opinion suit le vent qui tourne au jour le jour, ce n'est pas spécialement une bonne nouvelle pour la gauche, car cela ne peut traduire qu'une adhésion fragile.

Bref, je crois que l'opinion ne peut pas être trop secouée pour engager la "dérupture", car l'opinion revient de loin. Oui on est revenu à la case départ. Comme prévu on a perdu 5 ans, si ce n'est plus. On a beau s'impatienter, un balancier ne peut revenir de la droite vers la gauche sans devoir passer par le centre. Hollande donc. Parfait cataplasme pour recoller les morceaux. Ca aurait pu (dû même) être Bayrou, mais la machine à élections du PS fonctionne encore.

Antisarkozysme canal historique vs antisarkozysme d'alternance

Oui, en misant le premier sur l'honnêteté, l'intégrité, la sincèrité, l'humilité, et la lucidité, Bayrou était l'antisarkozyste historique. Mais il s'est fait piquer la place. Hollande est un opportuniste perspicace, grand spécialiste de l'alternance, qui a bien compris qu'un président sortant ne peut être réélu que s'il représente l'opposant au premier ministre en place. Et Sarkozy lui n'a pas compris qu'en ayant vampirisé son  premier ministre, il se sacrifiait lui même. Rien à vopir avec Chirace et Mitterand. Quoi de plus drôle que d'entendre aujourd'hui les membres de la majorité affirmer sans rire que le "vrai changement", c'est Sarkozy ! Bref Hollande a compris depuis le début que Sarkozy s'est accablé tout seul d'un handicap fatal, et que les français étaient prêts à lui préférer n'importe quel adversaire en face, pourvu qu'il soit son antithèse. Hollande est donc devenu antisarkozyste de circonstance, d'alternance pourrait-on dire. Bien aidé depuis le début par les évenements et d'autres protagonistes (DSK, Eva Joly qui se sabordent, Mélanchon qui fait campagne pour lui...), tout semble bien rouler pour lui à la veille du scrutin.

Une campagne non décisive

Pourtant "Flanby" nous inquiète et nous inquiètera jusqu'au bout. Peut-on reprocher à François Hollande de mener la campagne qu'il fait? Je l'ai souvent fait c'est sûr. Mais en même temps, peut-on lui reprocher de jouer sur le contrepied permanent et systématique? Sans autre portée que l'opposition parfaitement symétrique? Quand pourra-t-on juger de la pertinence de cette stratégie?

Le contrepied est absolu, jusque dans la façon d'envisager la campagne. Sarkozy avait fait une bonne campagne et a enchainé un mauvais quinquennat. Hollande fait une mauvaise campagne, non décisive, sans doute dans l'espoir un brin superstitieux que cela lui fasse faire un bon quinquennat. Et plagiant une dernière fois Bayrou dans l'idée que celui qui ne promet rien ne peut pas décevoir. Comment distinguer l'honnêteté du manque d'ambition? Il suffirait peut être d'assumer plus clairement ses convictions. Mais pour ça je crois qu'on peut aller se brosser...

Trempage, essorage ou repassage....

Entre un candidat qui ne veut pas se mouiller et un autre mouillé dans trop de choses, même si cela semble peu probable, l'issue peut encore basculer.

Du coup, je touche encore du bois. Parce que vu tout ce qu'on a avalé sans sourciller ces dernières années, tous ces évenements irrationnels sortis du chapeau depuis 2002 (21 avril inclus), il ne faut pas exclure un quinquennat de rattrapage qui nous sortirait, comme ça,  le 12 mai, d'un chapeau ou d'un dessous de table.. à repasser...

eux-font-velo-nicolas-sarkozy-L-1.jpeg

 

 

 

 

25/03/2012

En France, un climat...

 «Mettre en cause la société, montrer du doigt la France, la politique, les institutions, ce n’est pas digne», attaque-t-il. «Ce n’est pas faire preuve d’un esprit de responsabilité dans un moment où la nation a d’abord besoin d’unité. (…) Non, il n’y a pas en France un climat qui puisse expliquer ces crimes. (…) Chercher une explication au geste de ce fanatique, (...), lui chercher la plus petite excuse serait une faute morale impardonnable.»

 Sarkozy à Strasbourg, le 21 mars 2012

Oui, mais expliquer n'est pas un  synonyme d'excuser. Ce qui serait une faute surtout, c'est de ne pas savoir expliquer la construction de cette tragédie qui oscille entre fait divers imprévisible et acte de terrorisme inévitable. Et ce sermon moralisateur, non dénué d'intimidation même, est un peu court pour balayer la responsabilité de celui qui est de près ou de loin en charge de la sécurité des français depuis 10 ans désormais.

Ok, soit, ce n'est sans doute pas le discours de Grenoble, le débat sur l'identité nationale, la burka ou le hallal qui a fabriqué le monstre de Toulouse. Celui ci était déjà trop absorbé par le visionnage de vidéos de décapitation ou autres jeux vidéo violents pour être sensible aux sujets de société qui démangeaient l'hexagone, et l'islamisme furieux a fait le reste.
Ok pour dire que ce n'est pas forcément le climat en France qui a engendré ces crimes.
Mais reconnaissons que le climat en France n'a pas permis de les éviter.

Je ne jetterai pas la pierre aux diverses instances étatiques impliquées dans le drame de Toulouse en les accusant de manquements ou de failles. Justice, Police, DCRI... Depuis 10 ans ces organisations doivent mener de front des opérations aussi vastes et variées que la surveillance d'activistes islamistes radicaux et celles de fadettes de journalistes, assurer le suivi judiciaire de délinquants déséquilibrés tout en assurant des procès fleuves tels que Clearstream, traiter avec le Pakistan de sujets aussi divers que le commerce de sous marins nucléaires et les allers-retours de djihadistes. Il serait injuste de leur chercher des poux.

Non je crois qu'il est simplement temps de se reposer la question de la stratégie en place pour assurer le maintien de l'ordre depuis 10 ans.
Car finalement, avec le recul, un match de rugby contre le commissariat de proximité n'était-il pas plus subtil qu'une tragique partie de paintball contre une unité d'élite?



Police : Havrin - Sarkozy zéro par bakchichinfo

23/03/2012

Gravité

C'était pile ou face. Anders Behring Breivik ou Khaled Kelkal. 

Ce fut Khaled Kelkal. Plus exactement Mohamed Merah.

Bayrou a perdu, Guéant a gagné.

Nouveau coup de pouce d'Al Quaeda

Qui a réélu George W. Bush. Coulé Aznar.

Et Sarkozy? Ce qui est sûr, c'est que cela ne peut pas lui nuire (1).

Tout dépendra de savoir quand le soufflet va retomber. Quelle est la durée de vie d'un tel débordement émotionnel médiatique? Cette "séquence" taillée sur mesure lui suffira-t-il pour faire oublier tout le reste?

Peu importe. Au delà du drame, ce qui est à pleurer, toutes proportions gardées, c'est que le bilan humain ne se limitera pas à ces 7 pauvres victimes. Parce que ces évènements vont être récupérés par les cultivateurs de haine et d'amalgame pour alimenter les discours et les politiques les plus nauséabondes les prochaines années, et prédire, non sans une certaine indécente excitation auto-réalisatrice, les tragédies de demain... Les extrêmistes enragés ne sont pas prêts d'arrêter de nous pourrir la vie.

Le mal est fait. Le péril extérieur dort à l'intérieur. Le ver est dans le fruit. Le loup est dans la bergerie. Il est probable que le troupeau tétanisé se remette à suivre le berger peu prévenant dont il s'était progressivement détourné. Le suffrage universel pour choisir un personnage, c'est un concours de beauté pour moutons de Panurge. Il y a donc de fortes chance pour que l'on reconduise celui qui nous conduit ici (jusqu'ici), et celui ci a de fortes chances pour continuer à organiser le monde autour de ce qui renforce son statut de berger.

Je m'étais fait la même réflexion le 11 septembre 2001. Tout se vérifie. 

Conflit Israelo-palestinien. Irak. Radicalisation, extrêmisme, Afghanistan, guerre. Islamophobie, antisémitisme. Choc des civilisations minutieusment entretenu. Antiterrorisme. Répression. Le coupable enrôlé en prison. Comme prévu.

Pendant ces dix dernières années, si Mohamed Merah n'était pas passé par la case prison, il ne serait sans doute pas allé en Afghanistan. Commes d'autres.

Mais ici on préfère continuer à construire des prisons. C'est un choix.

L'humain se laisse plus facilement tirer vers le bas que vers le haut.

C'est surtout ça, la gravité.

J'en suis conscient, mais j'ai toujours du mal à l'accepter.

Et hop, 10 années de perdues, aucune de retrouvée.

 

 380704_194342077343352_100003026843739_309524_730588431_n.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

(1) Lire ici . A l’étranger, des crises de ce type ont pu avoir un impact très fort sur les élections : la popularité de Georges W. Bush a été dopée (+30 points) après attentats du 11-Septembre, l’élection et la réelection d’Ariel Sharon en Israël sont dues en grande partie à la psychose sécuritaire israëlienne causée par les attentats quotidiens, Vladimir Poutine était pratiquement inconnu des Russes avant son élection, il s’est fait connaître quelques semaines avant le vote en expliquant qu’il irait “buter les terroristes tchétchènes jusque dans les chiottes”. A chaque fois, cela a profité à celui qui incarnait l’autorité, aujourd’hui ce serait Nicolas Sarkozy.

 

16/03/2012

Candidat sans convictions

Qu'on me donne l'envie, l'envie d'avoir envie
Hier soir, après avoir passé 3 heures à botter en touche pour ne pas se mouiller,  François nous a exhortés à lui donner la force. J'ai toussé.
Ce n'est ne pas de la force qu'on a envie de donner aux dirigeants. Ils en font trop souvent mauvais usage. C'est plutôt des bonnes idées, de l'imagination, de l'envie, bref des convictions qui pourraient changer les choses. Et là, le François, il en a bien besoin.
Car non seulement il manque désespérément d'imagination, mais en plus quand il prône des mesures intéressantes, il ne sait pas les défendre.
Politique à papi
Un exemple. La taxation des hauts revenus à 75%. Une mesure "morale" selon lui.
Mais ça veut dire quoi? Cela veut dire qu'on interdit les hauts salaires parce que c'est indécent, au nom de la bienséance, comme on interdit de se balader seins nus ou en niqab dans la rue? Parce que ça choque les braves gens?
Si ça ne tenait qu'à ça, je serais contre cette mesure, digne des trente glorieuses. Un Etat qui fait usage d'autorité pour ne pas froisser le regard oblique des passants honnêtes ne m'intéresse pas.
En revanche, d'un point de vue de l'intérêt général je suis favorable à cette mesure. Pour quelle raison? Parce que je considère que le rôle d'un Etat est de mettre en place des règles de fonctionnement qui favorisent l'intérêt général. Parce que s'il n'y a pas de règle, l'individu ne va pas spontanément choisir le comportement vertueux. Le patron va donc se payer de façon abusive, parce que son voisin patron le fait aussi. Et ça, c'est mal.
Aidons François à s'attaquer "idéologiquement" aux inégalités
Pourquoi c'est "mal" de se payer abusivement?
Parce que, même si les économistes avaient raison en disant que le fait que les uns s'enrichissent n'appauvrit pas les autres, cela accroît les inégalités.
Est-ce que François considère-t-il que les inégalités sont bonnes pour l'intérêt général, comme le font sans complexe Sarkozy, Copé et cie qui nous expliquent à longueur de temps que la seule chose qui motive les gens c'est de devenir très riche et que s'il n'avait pas eu la perspective de devenir milliardaire Steve Jobbs n'aurait pas exprimé son génie? Et que donc il ne faut pas empêcher les gens de devenir très riches sinon ils vont tous se mettre à fumer des joints à longueur de journée en fraudant les assedics?
Ou bien est-ce que François pense que l'humain vaut quand même mieux que cela, qu'il a juste besoin de respect, et qu'il sera d'autant plus motivé pour bosser et faire preuve de conscience professionnelle qu'il n'aura pas l'impression de se faire exploiter par un dirigeant qui lui demande de se serrer la ceinture pour mieux se gaver?
Qu'attend-t-on pour oser affirmer que l'inégalité n'est pas facteur de richesse, mais de pauvreté? Qu'attend-on pour empêcher la droite pour continuer à faire des roues arrières sur leurs boulevards idéologiques ?
Je n'ai pas entendu François s'exprimer sur le sujet. A t-il seulement un avis sur la question? Si François refuse le bras de fer idéologique avec la droite, la fin de partie va décidément être douloureuse...

06/03/2012

Jamais responsable, encore moins coupable, et bien sûr toujours victime.... jusqu'au bout...

 

Des nouvelles de notre plus haut (ir)responsable 


Sarkozy est à terre. Mais il vit encore.

On n'est plus à une indécence près. Le voilà qui se bat pour substituer la préservation de son propre destin au destin du pays dans les préoccupations mentales de nos concitoyens, par une énième manipulation émotionnelle, cocktails d'identification-projection-introjection-chantage dont il a le secret.  C'est ce que met en évidence Philippe Sage, avec un résultat plus qu'éloquent.

On ne voit pas comment ça pourait fonctionner, mais qui sait, les français ont souvent montré qu'ils aimaient les grosses ficelles. Et pourquoi pas, faire mentir l'adage voulant que les histoires d'amour finissent mal.

Peu importe les pronostics, je veux juste ici approfondir ce que tout cela révèle du personnage de Sarkozy, qui pourtant était déjà perceptible depuis toujours.

En effet cette posture victimaire, cette incapacité à assumer n'est pas nouvelle. Contrairement à Philippe Sage qui évoque le rejet "viscéral" de Sarkozy pour la repentance pour expliquer cette attitude, j'y vois surtout la relation hystérique qu'il entretient avec le "pouvoir". Et sa plus totale incompréhension de ce qui lie le pouvoir et les responsabilités.

Détrompez-moi, mais je n'ai pas souvenir d'avoir vu un jour Sarkozy assumer correctement ses responsabilités. Ce qui est ennuyeux quand on a prétendu aux plus hautes.

Petit rappel de psychologie humaine

Victimisation et culpabilisation sont des syndromes symétriques de déni autour de la question de la responsabilité.

L'auto-victimisation, c'est quand on n'assume pas son pouvoir réel et les responsabilités qui en découlent. C'est quand on nie notre impact sur le cours des choses, qu'on attribue la cause de tout ce qui nous arrive à l'action des autres ou à l'environnement. Plus ou moins consciemment, on préfère invoquer la fatalité que les conséquences de nos propres actes, on minimise la portée de ses responsabilités réelles.9711-franck-ribery-au-bord-des-larmes-telefoot-video.gif

L'auto-culpabilisation au contraire, c'est quand on n'assume pas notre impuissance réelle. Plus ou moins consciemment, on exagère la portée de nos responsabilités. Plutôt qu'assumer son impuissance, on assume une faute imaginaire dont on veut croire qu'on n'aurait pu l'éviter, et qu'à l'avenir on ne la reproduira plus, pour maintenir l'illusion qu'on a ce pouvoir. Préférant la sanction à la fatalité, on s'attribue des responsabilités imaginaires.

Celui qui se victimise culpabilise forcément les autres, et réciproquement.

On a tous en tête l'image du petit caïd de notre collège ou de la caillera de notre quartier qui va crier à l'injustice et chercher à émouvoir les autorités avec moultes circonstances dédouanantes lorsqu'il est pris la main dans le sac. Ou du footballeur controversé qui vient jurer la main sur le coeur qu'il est victime de calomnie. Ce genre de victimes autoproclamées existent aussi dans les sphères bien plus respectables, et peut être cela nous choque moins.

Dans une démocratie représentative, je laisse à chacun d'apprécier le partage du pouvoir, des responsabilités, de la culpabilisation et de la victimisation, entre les citoyens représentés et leurs représentants. Ces dernières années, il me semble que le curseur a bien bougé...

S'attribuer les succès des uns, attribuer ses échecs aux autres 

Qui a en effet passé 5 ans à dénoncer des coupables individuels ou des causalités extérieures pour se défendre des carences du fonctionnement dont il avait la charge?

Les traders qui abusent, les profs qui savent pas instruire nos enfants, les assistés sociaux qui parasitent la société, les juges laxistes qui prennent les mauvaises décisions,  les délinquants multirécidivistes "génétiques" qui ne devraient pas naitre...

Pour celui qui a passé des années à théoriser sur la sincérité, l'irréprochabilité, la transparence (alors que Mediapart nous a révélé par exemple qu'en tant que ministre de l'intérieur il se rendait en Arabie Saoudite pour parler officiellement de laïcité le jour et d'armement la nuit), il n'y a rien d'étonnant à voir qu'il n'applique pas à lui même les principes imposés aux autres. La culture du résultat, les limogeages ou les mutations imposées de façon impitoyables et arbitraires voudrait qu'il ait la décence de ne pas se représenter, à défaut de démissionner. Mais non.

Le voilà toujours aussi pathétiquement droit dans ses bottes, à attendre qu'on s'apitoie sur son sort.

Icône du monde ancien.

Ce personnage restera dans l'histoire comme l'icône la plus aboutie de ce que la France néolibérale aura engendré : un combattant forcené, inflexible, sans limite, sans pitié, sans éthique. Un manipulateur habile, stratège des émotions, joueur virtuose du "pas vu pas pris" et du "je te tiens, tu me tiens, par la barbichette", à l'energie rare et au talent exceptionnel, en compétition contre tous. Le paroxysme de l'individualisme irresponsable et cynique, qui n'a pas à se préoccuper des conséquences de ses actes, puisque la doctrine dit qu'il suffit de donner le meilleur de soi même pour jouir par l'argent dans un monde toujours plus riche.

Un monde simple où les gagnants ont raison et les perdants ont tort. Un monde simple du "chacun pour soi et dieu pour tous" qui aurait pu être le meilleur des mondes, si seulement le bon dieu (ou la main invisible, selon qui nous le promettaient) avaient mieux fait leur boulot. Bref, c'est pas de sa faute... 

2370327.jpg

 

24/02/2012

L'inimagination au pouvoir (et le déni dans les têtes)

Un ancien monde a du mal à mourir. Un nouveau monde a du mal à naître.
Et dans cet entre-deux, nous devons faire un choix.

Nicolas Sarkozy - lettre aux électeurs expatriés (février 2012)

Une fois n'est pas coutume, je partage ce constat.

Dommage qu'ils nous ne le donnent pas, ce choix...

L'embarras du non-choix

Il est en effet déjà établi que, quel que soit l'issue du scrutin monarchique présidentiel prochain, nous aurons un élu qui se consacrera à rassurer les populations et les marchés quant au fait que rien ne va changer. Les sondages nous l'ont annoncé, on s'y plie. Changement d'équipe ou pas , on va re-signer pour 5 ans d'acharnement thérapeutique sur un système aussi moribond que toxique. La crise aura encore de beaux jours devant elle.

On ne voit pas comment Hollande, avec son robinet d'eau tiède, fera pour redonner au pays le souffle nécessaire pour se remettre dans le sens de la marche. Au mieux peut-on espérer, qu'en démantelant la Sarkozie, ça enlève au pays cette grosse épine dans le pied qui le paralyse tant (oui, un pays qui s'irrite de l'intérieur, en s'agitant frénétiquement, ça n'avance pas...), et que sonne enfin l'heure du réveil (des consciences). Mais, est ce que les français, débarrassés d'un chef magouilleur qui les martyrise autant qu'il les hypnotise, se remettront spontanément dans le sens de la marche avec un chef assez habile pour noyer les poissons? Rien n'est moins sûr.

Machine folle et imbéciles heureux

Quand ferons-nous le deuil du monde ancien?

Le système mécanique censé faire tourner l'économie de marché "autorégulée" (entendez "sans responsable") a démontré ses vices de forme. Cette mécanique ne peut fonctionner que sur une concurrence entre individus qui lamine les sociétés en portant les inégalités à des niveaux intenables, et que sur le concept d'expansion perpétuelle (la fameuse "croissance") qui est en réalité une fuite en avant dont on prend conscience quand on se prend des murs (le seul moyen qu'on a trouvé pour ralentir et nous donner l'impression de pouvoir reprendre les choses en main, en jurant nos grands dieux qu'on s'y prendra mieux la prochaine fois). Cette mécanique est donc absurde, non-maitrisable. Elle ne peut produire que des drames.

C'est comme si notre véhicule ne pouvait avancer qu'en accélérant. Nos experts en tous genres et autres dirigeants ont beau nous répéter qu'ils savent le piloter, jusqu'à quand allons-nous gober leurs explications foireuses et leurs diagnostics savants?

Cela pouvait faire illusion tant qu'on ignorait nos limites. Mais notre terrain de jeu se révèle de plus en plus étroit, les murs deviennent trop fréquents, trop infranchissables : dettes financières incontrôlables, ressources planétaires menacées, pauvreté explosive, dérèglement climatique. On va au tas.

Ces défis imposeraient à tout humain lucide, clairvoyant, responsable une profonde remise à plat. Qui déboucherait sur la volonté de rebosser tous ensemble, en remplaçant le mot "croitre" par "préserver", le mot "profiter" par "respecter". 

Oui il devrait y avoir du boulot pour tout le monde, et cela pourrait ête épanouissant pour chacun. Mais le constat est sans appel. Nous sommes juste irresponsables, court-termistes, aveuglés par nos addictions en tous genres, ou pieds et poings liés à nos dépendances matérielles. Bercés d'illusions par les ondes cathodiques. On ne réagit pas.

Choisit-on des représentants à notre image ou sont-ce nos représentants qui nous façonnent à leur image?

Je m'interroge et je m'inquiète.

Quand j'entends l'imposteur parmi les imposteurs, de son palais élyséen, nous raconter sans rire que le chômage va se résoudre si on redonne aux chômeurs l'envie de travailler, je tremble en observant la réaction de mes pairs.

Ont-ils réalisé que les defficits records de la balance commerciale signifient qu'on produit de moins en moins ce que l'on consomme? Ont-ils compris qu'on s'endette pour faire bosser des gens à l'autre bout de la planète au lieu de produire nous même? Croient-ils sérieusement que cela est dû au manque de motivation des chômeurs? Que cela est dû à l'existence des "profiteurs" de l'assistanat? Que l'existence 200 000 offres d'emplois non pourvues permettent d'affirmer sereinement que les 4 millions de chômeurs ne veulent pas bosser? Et vont-ils continuer à se laisser faire quand on les pousse à regarder pas plus loin que le bout de leur nez, à juger leurs voisins, leurs semblables plutôt que prendre du recul pour considérer gobalement le phénomène?

Après la fable de 2007 qui nous expliquait qu'il suffirait de travailler plus pour gagner plus, voilà qu'on nous sert l'idée qu'il suffit que les chomeurs acceptent de travailler pour qu'il n'y ait plus de chômage...

Distorsion et hypnose

Foutue magie du petit écran qui déforme notre vision au point d'exempter nos "responsables" de faire preuve de la moindre imagination pour changer le cours des choses. Le système est globalement parfait, à quelques ajustements près, car ce serait aux "défavorisés" de changer, de s'adapter... La belle affaire... Enième version de la rengaine conservatrice, du leit-motif ancestral des puissants sur les faibles : "aide-toi, et le ciel t'aidera..."

Pour revenir à cette nouvelle grosse ficelle sur la bouc-émiratisation de l'assistanat, je tremble à l'idée qu'une majorité de mes pairs retombe dans le panneau. Surtout que je n'entends pas de réaction lucide du candidat d'en face pour couvrir ce chant de flûte qui pourrait nous mener droit à la noyade.

Mais rassurez-moi, le désespoir est-il susceptible de conduire fatalement l'esprit humain à ce genre d'hypnose volontaire et à ces syndromes de déni? N'a-t-on vraiment pas d'instinct de survie?